Le 29 octobre 2024, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a rendu deux décisions majeures, annulant des redressements de l’URSSAF pour absence de preuve concernant la délégation de signature. Ces arrêts rappellent les règles strictes entourant la validité des contraintes émises par l’organisme de recouvrement.

Le cadre légal des contraintes URSSAF

Selon l’article R. 133-3 du Code de la sécurité sociale, une contrainte peut être émise si la mise en demeure reste sans effet dans un délai d’un mois après sa notification. Cette contrainte, qui agit comme un titre exécutoire, doit remplir plusieurs conditions de validité :

  1. Elle est généralement signifiée par un huissier de justice.
  2. L’acte de notification doit mentionner :
    • La référence de la contrainte et son montant,
    • Le délai pour former opposition,
    • L’adresse du tribunal compétent,
    • Les modalités pour saisir ce tribunal.
  3. Surtout, la contrainte doit être signée par une personne compétente, soit le directeur de l’organisme de recouvrement ou un délégataire dûment habilité.
L’importance de la signature

La Cour de cassation a confirmé que :

  • Le directeur de l’URSSAF peut déléguer sa signature à un agent (Soc. 30 mai 2002, n° 00-14.512).
  • Une contrainte signée par un délégataire est valide, à condition que cette délégation soit antérieure et régulièrement établie (Soc. 12 juillet 1988, n° 86-10.636).

Cependant, en cas de contestation, l’URSSAF doit prouver l’existence et l’antériorité de cette délégation. À défaut, la contrainte est considérée comme signée par une personne incompétente, entraînant sa nullité.

Soulignons que les signatures, en matière URSSAF, revêtent une grande importance. Par exemple, nous précisons, dans un autre article accessible ici, que le PV de travail dissimulé doit lui aussi être signé à peine de nullité.

Les conséquences brutales de l’absence de délégation

Dans les affaires jugées (CA Aix-en-Provence, 29 oct. 2024, n° 24/04505 et n° 24/04506), la contrainte émise par l’URSSAF était signée sous la mention « le directeur ou par délégation ». Toutefois, l’URSSAF n’a pas été en mesure de prouver :

  • La qualité du signataire au moment de la signature.
  • L’existence d’une délégation de signature antérieure à la contrainte.

La Cour d’appel a constaté :

  • Un défaut de justification de la qualité du signataire.
  • L’absence de réponse de l’URSSAF aux arguments soulevés par l’appelant.

Elle en a déduit l’irrégularité de la contrainte et a annulé la demande de paiement associée.

Conséquences pour les cotisants

Ces décisions illustrent l’importance pour les entreprises et les indépendants de vérifier la régularité des documents émis par l’URSSAF. Une contrainte non conforme peut être contestée et annulée, ce qui peut éviter des redressements injustifiés.

Pour cela :

  • Analysez les documents transmis par l’URSSAF.
  • Vérifiez la qualité et les pouvoirs du signataire.
  • Consultez un avocat spécialisé en droit de la sécurité sociale pour toute contestation.
Conclusion

La nullité d’un redressement pour absence de délégation de signature valide est un exemple de l’importance du respect strict des procédures par l’URSSAF. Si vous faites face à une contrainte ou à un redressement, n’hésitez pas à demander l’aide d’un professionnel pour protéger vos droits.

Nicolas Taquet

Avocat au Barreau de Pau

Liens utiles :