Contester un redressement opéré par l’URSSAF peut s’avérer complexe, même pour un juriste aguerri. Plusieurs procédures existent et divers actes interviennent. En outre, la Cour de cassation n’a pas toujours eu la même interprétation des textes. Dans une décision du 14 novembre 2024, elle a fourni un véritable mode d’emploi, simple à utiliser (Cass. civ. 2, 14 novembre 2024, n° 22-23.710, F-D).
Contester une mise en demeure
La décision de recouvrement est la « mise en demeure » visée à l’article R. 133-3 du code de la sécurité sociale. C’est en priorité cette décision qui doit être contestée par le cotisant qui s’oppose au redressement. A cet égard, la Cour de cassation juge que « la contestation formée à l’encontre de la mise en demeure doit être présentée, préalablement à la saisine de la juridiction de sécurité sociale, à la commission de recours amiable de l’organisme créancier dans un délai d’un mois à compter de sa notification ».
Pratiquement, lorsqu’il a saisi la Commission de Recours Amiable, le cotisant dispose alors de deux voies pour poursuivre la contestation (art. R. 142-6 du code de la sécurité sociale) :
- Soit le cotisant laisse la commission statuer sur sa réclamation. Dans ce cas, il attendra la notification de la décision ;
- Soit il fera application des dispositions de l’article R. 142-6 du Code de la Sécurité sociale aux termes desquelles, lorsque la décision du conseil d’administration ou de la commission n’a pas été portée à la connaissance du requérant dans le délai de deux mois, l’intéressé peut considérer sa demande comme rejetée et se pourvoir devant le Tribunal. Ce délai de deux mois court à compter de la réception de la réclamation par l’organisme de Sécurité sociale. Toutefois, si des documents sont produits par le réclamant après le dépôt de la réclamation, le délai ne court qu’à compter de la réception de ces documents.
Ainsi, le cotisant dispose d’un choix : soit laisser la commission statuer sur son différend, soit accélérer la procédure en saisissant le Tribunal en l’absence de décision de la commission un mois après sa saisine.
Former opposition à contrainte
Toutefois, parallèlement à cette procédure de contestation, ou, s’il n’a pas saisi la Commission de recours amiable, conformément à l’article R. 133-3 du Code de la sécurité sociale l’URSSAF est tout à fait en droit de faire signifier une contrainte. La Cour de cassation note à ce sujet que « si la mise en demeure reste sans effet au terme du délai d’un mois à compter de sa notification, le directeur de l’organisme créancier peut décerner une contrainte à l’encontre de laquelle le débiteur peut former opposition auprès du tribunal compétent dans les quinze jours de sa signification ». Ainsi, la seule condition permettant à l’URSSAF de décerner une contrainte et l’absence de paiement de la dette dans le délai d’un mois. Cela signifie que même s’il a contesté la mise en demeure devant la CRA, le cotisant n’est pas à l’abri de se voir signifier une contrainte.
Cela signifie également que le cotisant qui n’a pas contesté la mise en demeure devant la CRA dispose d’une « session de rattrapage » avec la contrainte. Il n’aura alors qu’à attendre que la contrainte lui soit signifiée par voie d’huissier. A cet égard, la Cour de cassation estime que : « Contrairement au cotisant qui a saisi la commission de recours amiable d’une contestation de la mise en demeure et qui (…) n’a pas contesté en temps utile la décision de cette commission, le cotisant qui n’a pas contesté la mise en demeure devant celle-ci, ne dispose de recours effectif devant une juridiction, pour contester la régularité de la procédure et le bien-fondé des sommes qui font l’objet de la contrainte, que par la seule voie de l’opposition à contrainte ».
La question s’est posée toutefois de savoir si, dans le cadre d’une opposition à contrainte et en l’absence de saisine de la CRA contre la mise en demeure, le cotisant tait en droit de soulever tous les arguments qu’il souhaitant et notamment des arguments de procédure.
La réponse de la Cour de cassation est clairement positive : « Le cotisant qui n’a pas contesté la mise en demeure devant la commission de recours amiable peut, à l’appui de l’opposition à la contrainte décernée sur le fondement de celle-ci, contester la régularité de la procédure et le bien-fondé des causes de la contrainte ».
Nicolas Taquet
Avocat au Barreau de Pau