La Cour d’Appel de Toulouse a annulé un redressement URSSAF pour vice de forme. En cause : la lettre d’observations ne mentionnait pas tous les documents analysés par l’URSSAF lors de son contrôle (CA Toulouse, 7 mars 2024, n° 22/02524) ! Explications.
Après un rapide contrôle, l’URSSAF Midi-Pyrénées réclamait la rondelette somme de 79.146 euros à une société, dont 65.783 euros de cotisations et 13.363 euros de majorations de retard.
La société a bien sûr contesté la mise en demeure devant la CRA, puis devant le Tribunal Judiciaire. Ayant obtenu gain de cause en première instance, c’est l’URSSAF qui a fait appel.
Pour sa défense, la société invoquait un vice de procédure : selon elle tous les documents analysés par l’inspecteur URSSAF n’étaient pas mentionnés dans la lettre d’observations.
En effet, l’article R 243-59 du code de la sécurité sociale prévoit qu’à la fin du contrôle, l’inspecteur URSSAF doit communiquer à l’employeur une « lettre d’observations » datée et signée mentionnant l’objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle.
La Cour d’Appel de Toulouse énonce que : « La mention des documents consultés permet notamment à la personne contrôlée d’identifier les omissions qui lui sont reprochées ou de préciser la portée des documents vérifiés. La liste des documents consultés facilite également la reconnaissance d’un accord tacite de l’URSSAF sur certaines pratiques contrôlées ».
Ici, la société versait au débat un mail adressé à l’inspecteur URSSAF pendant le contrôle, indiquant : « vous trouverez ci-joint les courriers de livraison des véhicules aux collaborateurs. Ces courriers précisent les règles d’utilisation des cartes carburant en rappelant l’interdiction d’utiliser la carte de carburant les week-ends, jours fériés et congés ».
Or, ces courriers de livraison n’étaient pas mentionnés dans « la liste des documents consultés » de la lettre d’observations. Et cela était finalement fort dommageable pour la société car justement, le redressement portait sur … la mise à disposition d’une carte carburant permanente à certains salariés.
En clair, les justificatifs apportés par la société étaient en mesure de changer la donne sur le redressement. Pourtant l’URSSAF n’a écouté qu’elle-même et n’a visiblement pas pris en compte ces documents.
Sur ce point, la Cour d’Appel de Toulouse mentionne que : « Comme l’indique l’URSSAF, c’est la carence probatoire de l’employeur qui fonde le redressement. Doit donc figurer dans la lettre d’observations la mention des éléments de preuve apportés par celui-ci et consultés par l’URSSAF, tels les courriers de livraison du véhicule de fonction signés par les salariés, qui mentionnent que ‘l’utilisation de la carte de carburant est réservée au service de la société. Elle ne peut donc pas être utilisée les week-ends, jours fériés et durant vos congés’. Le fait même que l’URSSAF conteste la force probante de ces éléments de preuve confirme que l’examen de ces documents consultés est nécessaire pour apprécier le bien fondé du redressement ».
La liste des documents consultés figurant dans la lettre d’observations était donc incomplète. La Cour procède donc à l’annulation du redressement.
Certes, le redressement est annulé pour un motif de régularité formelle de la lettre d’observations. Mais ce vice de forme dénote une réelle problématique dans l’appréciation des justifications par l’URSSAF.
La forme rencontre le fond …
Nicolas Taquet
Avocat au barreau de Pau